Epandage aérien : la mobilisation continue - les dérogations seraient illégales !

Bruno - 10/09/2012
Image:Epandage aérien : la mobilisation continue - les dérogations seraient illégales !

Jeudi 13 septembre - à la Casa del Tango
La pulvérisation de BANOLE actuellement réalisée en Guadeloupe serait ILLEGALE

La mobilisation contre l’épandage aérien de pesticides en Guadeloupe continue. Plus de 7000 tracts ont déjà été distribués cet été par le Collectif contre l’épandage aérien qui se réunira ce jeudi 13 septembre à La Casa del Tango, à Jarry, à 19 heures.

Dans le communiqué publié ci-dessous, le Collectif attire l’attention des Guadeloupéens sur le fait que les épandages aériens réalisés jusqu’à ce jour seraient illégaux, car utilisant le BANOLE alors que l’ANSES n’a pas encore formulé d’avis pour l’utilisation de ce produit par voie aérienne. En effet, comme l’a rappelé M. Marc Mortureux, directeur de l’ANSES (lire ci-dessous [1]), est exigé "un avis préalable de l’ANSES afin que l’évaluation de chaque substance tienne compte de son mode de diffusion."

Enfin, le Collectif s’adresse aux élus Guadeloupéens [2] dont certains, parmi lesquels M. Chalus [3], ont déjà fait état de leurs préoccupations quant à l’autorisation accordée par le Préfet de réaliser ces épandages aériens de pesticides.

Communiqué du Collectif contre l’épandage aérien en Guadeloupe

Nous vous communiquons ci-dessous la position de Monsieur Ary Chalus - député de la troisième circonscription de la Guadeloupe et maire de la commune de Baie-Mahault - et la lettre que nous adressons aux élus guadeloupéens.

Nous vous transmettons aussi cette information très importante : cet extrait du courrier de Madame Pascale Robineau scientifique de l’ANSES [4], saisit par le Dr Frederique Sarazin, dermatologue membre de la cellule santé/scientifique du Collectif. 

Selon cette scientifique, les épandages aériens de Banole qui ont lieu en ce moment sont illégaux puisque l’ANSES n’a pas formulé d’avis pour ce type d’utilisation aérienne :

"L’ANSES n’a actuellement pas réalisé d’évaluation des risques ni émis d’avis pour le BANOLE ou le BANOLE EV dans des conditions d’application par pulvérisation aérienne (...) L’utilisation du BANOLE ou du BANOLE EV à un produit fongicide pour traiter les parties aériennes du bananier ne serait ainsi possible que par voir terrestre."

Autrement dit, la pulvérisation de BANOLE actuellement réalisée en Guadeloupe est ILLEGALE et l’arrêté N 2012-811 DICTAJ/BRA l’est tout autant, la directive 2009/128/CE transposé par l’arrêté du 31 mai 2011 stipulant que tous les produits - dont les adjuvants - doivent avoir été évalués pour cette une application aérienne !!!

On peut également constater que tous les épandages réalisés tout au long de l’année 2011 étaient tout à fait illégaux, d’autant plus que certains d’entre eux n’ont été réalisés qu’avec le BANOLE.

On a donc gravement trompé les Guadeloupéens.

Cela renforce notre détermination à continuer notre lutte et nous invitons tous les Guadeloupéens à nous rejoindre, à nous soutenir dans l’action que nous menons dans l’intérêt supérieur de la Guadeloupe.

L’adversaire fait courir le bruit que nous visons essentiellement la disparition de la banane dans l’intérêt des promoteurs immobiliers ! Cela est bien évidemment absurde !

On ne peut tromper indéfiniment l’opinion guadeloupéenne.

Nous invitons tous les concernés à réfléchir pour trouver une autre alternative au traitement de la banane par de tels produits chimiques.

Les Commores par exemple, ont abandonné les traitements chimiques pour des solutions alternatives. A ce sujet, nous avons créé une cellule de réflexion sur les solutions alternatives.

Signalons aussi l’existence de deux autres cellules, une cellule juridique et une cellule scientifique.

Nous sommes donc des citoyens responsables et les spécialistes sur ces questions peuvent nous rejoindre.

Un syndicat de producteurs agricoles comme l’UPG travaille aussi sur des positions alternatives. Toutes ces réactions montrent donc la bonne santé de la société civile guadeloupéenne.

Durant ces dernières semaines, nous n’avons pas cessé de multiplier nos actions.

Plus de 7000 tracts ont été distribués dans 6 communes : Trois-Rivières, Basse-Terre, Sainte-Rose, Anse Bertrand et Pointe-à-Pitre.
 
Avec cette rentrée nous allons intensifier notre lutte et nous vous invitons tous à une réunion du collectif qui se tiendra jeudi prochain, 13 septembre, à la Casa del tango à 19 heures.  

Venez nombreux.

Pour le Collectif contre l’épandage aérien en Guadeloupe
Jacky Dahomay

Lettre aux élus du Collectif contre l’épandage aérien

Lettre Ouverte aux Élus Guadeloupéens,
Maires, Députés et Sénateurs,
Conseillers régionaux, Conseillers Généraux, Conseillers Municipaux

Depuis trois mois, la société civile guadeloupéenne se mobilise chaque jour un peu plus pour faire obstacle à l’autorisation dérogatoire, qui a été finalement accordée par l’Etat à compter de ce mois de juillet 2012 et pour une nouvelle période de six mois, à l’épandage aérien de pesticides classés dangereux pour l’environnement sur les bananeraies de l’archipel.

Les produits incriminés sont clairement et incontestablement, malgré tous les arguments fallacieux du Syndicat des Planteurs, considérés comme cancérigènes avérés ou potentiels, perturbateurs endocriniens et toxiques pour la reproduction par l’ensemble des spécialistes (de l’Union Européenne, de l’OMS et des USA en particulier).

L’Ordre des Médecins de la Martinique, le Parc National de la Guadeloupe, le Conseil de la Culture, de l’Environnement et de l’Education, la Commission Environnement Agriculture du Conseil Général, des dizaines d’associations engagées dans la défense de l’environnement, plusieurs milliers de citoyens : tous se sont pourtant clairement prononcés contre cette nouvelle dérogation.

Néanmoins, encore une fois, et malgré la douloureuse expérience de la contamination par la Chlordécone et d’autres Polluants Organiques Persistants, les Ministres concernés et le Préfet qui les représente, ont fait le choix de passer outre le principe de précaution et de mettre en danger gravement la santé de la population, au seul motif qu’il n’y aurait pas d’autre solution actuellement (ce qui est faux : il en existe mais probablement moins rentables) pour préserver les plantations de bananes, destinées en fait pour l’essentiel à l’exportation vers l’UE, et surtout sources de juteuses subventions aux gros producteurs.

On nous fait le chantage à l’emploi (3000 emplois directs ou indirects, dont les travailleurs sont en fait les premières victimes de cet empoisonnement par les pesticides) pour nous faire accepter, comme par le passé, de sacrifier notre santé, celle de nos enfants et l’avenir de notre territoire, dont les sols et les rivières sont déjà et seront ainsi davantage et durablement pollués. Il vaudrait mieux préparer dès maintenant la reconversion de ce secteur et la diversification de nos productions agricoles pour mieux couvrir les besoins de la population locale.

Des élus guadeloupéens, trop peu nombreux encore - ont d’ores et déjà, courageusement pris clairement position contre l’épandage aérien dans l’intérêt même de la population. 

Par cette lettre ouverte, nous vous demandons aujourd’hui de faire connaître à votre tour, solennellement et publiquement, en tant qu’élus du peuple, votre position sur ce danger pour la santé publique et pour l’environnement.

Nous enregistrerons bien entendu et publierons la liste des élus signataires de cet appel.

Le Collectif contre l’épandage aérien en Guadeloupe

Question de M. Chalus au Ministre de l’agriculture

Question publiée au JO le 28/08/2012 (page 4805) - site de l’Assemblée Nationale

M. Ary Chalus attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt sur la problématique de l’épandage aérien comme dispositif de traitement visant à lutter contre la cercosporiose noire dans les bananeraies de Guadeloupe et Martinique.

Sur la dernière décennie, la banane représente 20 % de la production agricole en Guadeloupe et 54 % en Martinique. La filière Banane est aussi le premier employeur privé de ces régions ; elle génère en tout plus de 10 000 emplois ; environ 1 actif sur 20 aux Antilles travaille pour la filière Banane !

L’épandage aérien de fongicides qui vise à lutter contre la cercosporiose noire, qui menace nos bananeraies depuis 2010, préoccupe nos populations qui demeurent traumatisées, à juste titre, par le scandale du chlordécone.

Il convient aujourd’hui d’anticiper et de prévenir tout risque sanitaire tout en cherchant à préserver une activité économique qui représente 14 % des exportations de notre territoire. En effet, certains observateurs considèrent que cette pratique comporte des risques pour la santé humaine, la pollution des sols et des cours d’eau.

Ces préoccupations ont d’ailleurs été étayées par les hésitations du Conseil européen sur l’inscription du BANOLE à l’annexe I de la directive 91/414/CEE. Le conseil de l’UE a d’abord proposé la non-inscription du BANOLE (CAS 64742-46-7) à l’annexe I de la directive du Conseil dans une proposition de décision du conseil Européen datée du 25 mai 2009, avant de se raviser un mois plus tard, le 25 juin 2009, en inscrivant les dites substances dans l’annexe I.

Plus encore, la méthode d’application envisagée, l’épandage aérien, n’est autorisée que « dans des cas particuliers et sous conditions ». Parmi ces conditions figure la réalisation d’une évaluation spécifique des risques liés à l’épandage aérien. En France, cette évaluation est confiée à l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail).

D’ores et déjà, nous savons que les restrictions interdisant l’épandage aérien, y compris de produits autorisés, à moins de 50 m des zones habitées limitera fortement, dans nos régions à l’habitat diffus, l’efficacité du traitement.

Ceci pourrait d’ailleurs remettre en cause l’opportunité d’une telle dérogation. Nous soulignons enfin que les stratégies de lutte actuelles ne pourront être utilisées indéfiniment. Par exemple, en Amérique centrale, des phénomènes de résistance des champignons aux traitements ont été observés deux ans seulement après le démarrage de leur utilisation. Le meilleur rempart contre la cercosporiose sera la découverte de variétés résistantes.

Aux Antilles, la filière a fait le choix du croisement des variétés actuelles avec des variétés sauvages afin de ne pas avoir recours aux OGM. Dans cet objectif, l’Institut technique de la banane (ITBAN) créé en 2009 et devenu IT2 (Institut Technique Tropical) en 2010. La priorité de l’ITBAN était la recherche variétale, mission confiée au Cirad, l’Institut devant procéder aux essais en direct chez les planteurs associés au processus.

Il lui demande donc si les services du ministère peuvent fournir une évaluation des travaux de l’IT2 ?

Où en est-on au niveau des moyens alloués à ces missions ?

Est-il possible de rendre publics les résultats de l’évaluation spécifique des risques effectuée par l’ANSES ?

Enfin quelles sont les mesures qui seront prises par le Gouvernement pour éviter un nouveau drame sanitaire dans des départements où la culture de la banane demeure un des piliers de l’économie locale ?


Les élus et le Gouvernement concernant l’épandage aérien

En attendant la réponse de M. Stéphane Le Foll, Ministre de l’agriculture à la question de M. Chalus, quelques réactions d’élus (dont celle de Victorin Lurel) et la réponse apportée par M. Marc Mortureux, directeur de l’ANSES, sur la multiplication des demandes de dérogations.

L’épandage aérien sur le site de l’Assemblée Nationale

Mme Brigitte Allain - la scandaleuse distribution de dérogations

Lors d’une précédente séance de Questions au Gouvernement, le mercredi 25 juillet 2012, Mme Brigitte Allain (députée de la 2e circonscription de Dordogne - groupe écologiste) avait déjà interrogé le Minitre de l’agriculture sur la "scandaleuse distribution de dérogations qui autorisent les épandages de pesticides par voie aérienne dans les champs pendant l’été." Elle rappelait qu’"alors que ces dérogations devraient être exceptionnelles, elles sont devenues la règle", ajoutant que "les produits utilisés comportent des matières dangereuses pour la santé humaine, animale et pour la biodiversité."

M. Stéphane Le Foll, Ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, aura répondu que "s’agissant des épandages, des dérogations différentes ont été données selon les départements. Mon objectif sera de les harmoniser et de faire en sorte que, au fur et à mesure que nous trouverons des alternatives, nous finissions par nous passer de ces épandages aériens de produits chimiques."

Lors de l’audition de M. Victorin Lurel, ministre des Outre-mer - jeudi 19 juillet 2012

Alors que M. Jean-Philippe Nilor attirait l’attention du Ministre des Outre-mer, M. Victorin Lurel, sur l’épandage aérien, celui ci répondra :

"S’agissant de l’épandage aérien, je vous rappelle qu’en France, ce sont 100 000 hectares, 22 régions et 66 départements qui sont actuellement concernés par cette pratique de l’épandage aérien, notamment pour la culture du maïs, de la vigne, du riz – en Guyane – et de la banane – 200 000 tonnes produites à la Martinique et 60 000 à la Guadeloupe.

Parce que la toxicité des produits utilisés pour l’épandage aérien n’est pas avérée, j’ai prorogé de six mois l’autorisation de cette pratique outre-mer. Je sais que cette décision a pu déplaire aux associations de défense de l’environnement, mais je l’ai assortie d’un certain nombre de conditions, notamment sur le plan technologique – tracteurs équipés de mats télescopiques pour surplomber la canopée de la banane.

Sans cette décision de prorogation, que j’assume pleinement, la banane martiniquaise et guadeloupéenne était vouée à disparaître dans les six à douze prochains mois, mettant ainsi en péril des dizaines de milliers d’emplois. Il s’agit en outre d’une douzaine de passages par an dans nos territoires ultramarins, contre plus de cinquante chaque année au Guatemala et au Costa Rica."

M. Marc Mortureux, directeur de l’ANSES

Le Mercredi 18 juillet 2012, la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Marc Mortureux, directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES).

Interrogé par M. Jacques Krabal (groupe RRDP) sur l’utilisation de pesticides qui font l’objet d’interdictions légales alors que les demandes de dérogations se multiplient, M. Marc Mortureux aura répondu :

"Concernant les pesticides, au-delà de leur impact sur le consommateur, nous avons décidé de mettre en place un groupe d’experts spécifique car plusieurs collectifs d’experts sont concernés en même temps, au niveau de l’évaluation des risques comme des produits réglementés. L’étude des effets de l’exposition des travailleurs agricoles aux pesticides est symbolique de la valeur ajoutée attendue de la fusion de l’AFSSA et de l’AFSSET : nous nous écartons du seul cadre réglementaire pour aborder la question de façon très ouverte. Les conclusions du groupe d’experts sont attendues fin 2013.

L’épandage aérien est soumis à une nouvelle règlementation européenne renforcée. Jusqu’à présent, l’épandage aérien de n’importe quelle substance autorisée pouvait faire l’objet d’une dérogation préfectorale. Dorénavant, on exige un avis préalable de l’ANSES afin que l’évaluation de chaque substance tienne compte de son mode de diffusion : de fait, l’épandage aérien conduit parfois à des dispersions au-delà de la surface visée.

À la demande du ministère de l’agriculture, nous avons déjà rendu treize avis à ce sujet, dont quatre défavorables, et seules certaines substances peuvent désormais faire l’objet de dérogations préfectorales.

Mais l’avis que nous émettons ne vaut pas autorisation par lui-même : nous ne nous prononçons pas sur l’opportunité des dérogations, qui doivent demeurer exceptionnelles et qui relèvent de la responsabilité des préfets selon des critères d’appréciation locale. Le nombre de demandes de dérogations a beaucoup diminué par rapport à la période antérieure. Les statistiques correspondantes sont tenues par le ministère de l’agriculture."

• La Casa del Tango (plan d’accès)

• Ary Chalus (Assemblée Nationale)

• L’ANSES : http://www.anses.fr

L’ANSES a été créée le 1er juillet 2010 par la fusion de deux agences sanitaires françaises : l’Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) et l’Afsset (Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail).

"Dans son champ de compétence, l’Agence a pour mission de réaliser l’évaluation des risques, de fournir aux autorités compétentes toutes les informations sur ces risques ainsi que l’expertise et l’appui scientifique et technique nécessaires à l’élaboration des dispositions législatives et réglementaires et à la mise en œuvre des mesures de gestion des risques.

Elle assure des missions de veille, d’alerte, de vigilance et de référence. Elle définit, met en œuvre et finance des programmes de recherche scientifique et technique.

Elle propose aux autorités compétentes toute mesure de nature à préserver la santé publique. Lorsque celle-ci est menacée par un danger grave, elle recommande à ces autorités les mesures de police sanitaire nécessaires.
Elle participe aux travaux des instances européennes et internationales, et y représente la France à la demande du Gouvernement."

[1réponse à la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

[2Lettre ouverte aux élus

[3dans une question écrite au Ministre de l’agriculture

[4Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

 Vos commentaires

Articles référencés 

Avis d'épandage de pesticides - Le Droit
30/03/2024
Des députés français contre la déréglementation des OGM/NTG
13/02/2024
Les États membres bloquent la déréglementation des OGM
8/02/2024